De l’Arc Antillais à…l’Amérique du Sud !

Journal de bord

 

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Carthagène…des mondes se croisent…

Initialement Kanaga devait faire escale dans les superbes îles Vénézuéliennes…mais le climat politique nous a fait revoir la copie pour nous arrêter à Trinidad et Curaçao avant de découvrir la côte Colombienne…

Trinidad

Nous avons quitté Grenade il y a un peu plus de trois semaines avec le sentiment de naviguer vers de nouveaux horizons…bon néanmoins, la première étape était technique ! Effectivement, il nous restait après le carénage de Kanaga à retailler son hélice. Cap donc sur Trinidad et la baie de Chaguaramas : le paradis de la réparation des bateaux…

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« Hélice » island ?

Entre deux plongées pour monter/démonter l’objet de notre venue, il est tentant de se lancer dans quelques explorations des alentours. Les superbes montagnes aperçues lors de notre arrivée au petit matin nous faisaient de l’oeil.  Le temps de trouver un taxi man…lequel nous a fortement déconseillé d’aller voir les cascades sans escorte policière ! Il semblerait que depuis quelques années la sécurité se soit dégradée ici, notamment pour les locaux (indépendamment des évènements vénézuéliens). Nous avons donc décider de nous atteler à la découverte de Port of Spain et …de ses taxicos : pour l’arrêter utilisez votre pouce, mais mieux vaut savoir où vous allez : vers le haut c’est tout droit, vers l’arrière c’est vers la côte et vers le bas…heu ça doit être que vous savez plus.

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Petit mouillage au Nord de Chaguaramas…

De retour à bord et une fois notre hélice passée au crible de son chirurgien et remise en place, il a fallu la tester : pour que Kanaga aille encore et toujours plus vite : 9 noeuds sur mer plate…soit quasi 20 km…les équipiers avec des seaux d’eau à l’arrière pour éviter que le sillage ne fume…bref, voilà notre voilier transformer en Formule 1 !  Quelques mouillages suivront et hop cap vers Curaçao…

Curaçao

Les vents sont avec nous ! Nous laissons le Vénézuela à bâbord, et faisons une moyenne de 7 noeuds toutes voiles dehors avec deux ris chacune – pour ceux qui suivent, cette fois-ci l’hélice n’a rien avoir avec ces vitesses incroyables (restons enthousiastes!), mais le vent associé au courant de l’Orénoque – 2 noeuds tout de même – nous pousse vers notre objectif. L’arrivée à Curaçao, une île hollandaise, est surprenante. Nous nous enfonçons dans une immense baie abritée aux bras multiples. Un  véritable labyrinthe dont les berges sont occupées soit par de luxueux hôtels soit par des maisons sur pilotis, dont certaines ont une architecture capable de réveiller le gosse qui sommeille en vous ! Les escapades sur île seront teintées de couleur, que ce soit les rues de sa capitale, Willemenstaad, les lagons turquoises comme le curaçao local et les flamands roses, roses.

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En surface…

L’un de nos équipiers y soufflera ses 30 bougies se mêlant à la vie nocturne de l’île, pendant que les plus raisonnables s’offriront une plongée matinale le lendemain sur une épave de remorqueur accessible en apnée, le tout dans une atmosphère industrio-balnéaire, un concept surprenant et réussi. Longer la coque du bateau-forage à quai à coup de palmes est une immersion des plus étonnantes…! Les poissons ne sont pas en reste et là aussi, les couleurs sont au rendez-vous.

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…Et dans les fonds…
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À quelques encablures de l’épave

Cotes colombiennes…

Voici venue l’heure d’affronter le fameux Cabo de la Vela pour atteindre la Colombie. Le dictionnaire espagnol traduit vela par 3 significations « veille, bougie ou voile ». Difficile de dire quelle est le sens qu’il a ici. Personnellement, au vue des conditions et de l’impossibilité de dormir avec ces paquets d’eau et un vent établi à 30 noeuds (c’est promis, ce n’est pas exagéré, il y a des témoins et l’anémomètre qui valident), je pencherai plutôt pour la veille (personne n’a réussi à fermer l’oeil…)… en tout cas côté voile, le « cap de la voile » serait au mieux une mauvaise blague ! Heureusement on nous avait prévenu – réduisez la voile aux abords de la Colombie et ne longez pas la côte de trop près : ça déménage ici !!

On se fait donc bien secouer, mais on avance toujours, et les quarts de nuit sont magiques, avec la croix du sud qui nous fait un clin d’oeil. Kanaga n’a jamais autant été à l’ouest…voilà de quoi nous réjouir ! Nous arrivons sur les chapeaux de coque, de nuit -sinon ce n’est pas drôle – après trois jours de mer dans la baie de Santa Marta, au Nord Est de la Colombie. « Laurence », notre fidèle traceur nous abandonne pour l’arrivée, histoire que la surprise soit plus forte. Nous passons l’île Morro, les éléments se calment d’un coup et nous pouvons rentrer au port…à gauche des portes-conteneurs déchargent, à droite quelques grands buildings éclairés. C’est notre première escale d’Amérique du Sud. Sur le quai, deux colombiens arrivent, il est 3h du mat et ils sont adorables, nous accueillent à bras ouverts en nous souhaitant la bienvenue et en nous demandant comment s’est passé le voyage. Sacré accueil, on n’a encore rien vu du pays, mais nous voilà  déjà conquis ! Les jours qui suivent nous prenons nos marques, découvrons la ville grouillante et vivante, des jus de fruits aux goût divins, des cafés…dignes de leur réputation et des escapades dans le parc naturel ou montagnes voisines suivant les goûts !

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America del Sur !!
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Les rues de Santa Marta…
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…et ses habitants…
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Une résistante ?

Puis nous reprenons la mer pour 24 heures de navigation vers …Carthagène, le terminus pour certains de nos équipiers. Une mer de nouveau agitée et une arrivée à l’aube avec une ville immense qui se devine dans la brume. Des dizaines de buildings et tours « Et! on s’est trompé on est à New York? » plaisante l’un… « meuh non il manque la statue de la liberté… ». Ceci étant, une fois rentrés dans la baie on croise une statue de la vierge à l’enfant qui siège ici au carrefour de cargos, lanchas de pêches et voiliers de plaisance… On est loin de Carriacou et ses 5000 habitants…900 000 personnes vivent ici, dont une partie dans les cimes à en croire ce que l’on voit.

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Arrivée à Carthagène…
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…ou Nueva York ?
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…et sa statue…

Au milieu de cette ville ultra-moderne, le coeur historique, patrimoine de l’Unesco, rappelle ce qu’a été Carthagène, l’une des capitales du nouveau monde…Les inégalités y sont plus marquées qu’à Santa Marta, la population tout aussi métissée : descendant des colons espagnols et types européens, indiens (4 ethnies différentes vivent toujours en relative autonomie en Colombie) et visiteurs des 4 coins de la planète.

Notre escale Colombienne ne durera au total qu’une douzaine de jours…pour un pays qui donne une irrésistible envie de chausser son sac à dos pour se perdre à l’intérieur et y découvrir des paysages et gens. Un micro-aperçu qui donne un goût de reviens-y.

Pour l’heure c’est au Panama que nous avons choisi de passer du temps…nous nous apprêtons à y vivre presque 6 mois…avec une première navigation dans l’archipel des San Blas où vivent les indiens Kunas. Rendez-vous dans quelques semaines pour les premières impressions !

À suivre…

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Se perdre dans le coeur historique…

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Le trésor de Geneviève…

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Cracheur de feu au carnaval…

La route est courte entre Carriacou et Grenade : une trentaine de milles..5 ou 6 heures de navigation et on y est. Alors que Kanaga quittait l’île non sans émotions, une drôle de pêche attendait son équipage…

Les derniers jours de l’escale de Kanaga à Carriacou étaient sous le signe du Carnaval. Le temps d’un long week-end et la paisible Tyrell Bay se transforme en place animée avec un débarquement de tous les gens de Grenade qui viennent participer au Carnaval (celui de Grenade étant décalé en période estivale). Des personnes aux motos, tout le monde est transformé pour 3 jours de fête non-stop.

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La première nuit prolongée est celle des « Jouvert » avec des centaines de personnes qui défilent déguisés en diables (et diablesses…) : leurs corps sont recouverts d’huile de vidange et ils sillonnent les rue de la capitale, Hillsborough, accompagnés par des camions sur lesquels sont installées des baffles qui hurlent les dernières musiques à la mode locale. C’est assourdissant et impressionnant ! La symbolique est forte et met même mal à l’aise lorsque des hommes et des femmes s’enchaînent et marchent ainsi en cercle, le regard sombre avec des morceaux de poissons dans la bouche, cette fois-ci dans un silence total. Le cracheur de feu et les danses (endiablées elles aussi!!) qui suivront re-détendent l’atmosphère pour continuer les festivités encore deux jours durant.

Un dernier passage dans les îles désertes qui jouxtent Carriacou, des au-revoir aux amis le coeur un peu gros et la larme à l’oeil et Kanaga appareille au petit matin pour…Grenade.

Avant de nous diriger vers la capitale, Saint Georges, nous décidons de faire étape dans un mouillage que l’on aime bien. Deux solutions : mouiller à droite de la cabane de Robinson de rêve qui est en haut de l’île « comme d’hab » ou à gauche. On jette l’ancre à gauche, pour changer. Deux équipiers se mettent à l’eau, et signalent une zone avec de superbes gorgones géantes et quelques mues de langoustes…

Ni une, ni deux, je me mets à l’eau également avec l’espoir de croiser quelques antennes…En palmant, j’aperçois au fond de l’eau une épave d’annexe qui ressemble fortement à celles que fabrique Dom, notre copain soudeur de Tyrell Bay. Trop accaparée à mon affaire de crustacés, je passe et garde ça dans un coin de tête. Je rentre à bord une bonne heure plus tard, bredouille. Chacun vivant sa vie : lecture de BD, réparations en tout genre, grands débats, je ne m’étant pas sur mon escapade à ce moment là.

La nuit se passe et au petit matin nous faisons les préparatifs pour appareiller. Allez savoir pourquoi, entre le café et la tartine j’évoque cette annexe aperçue sous l’eau. Réaction du captain’ : « Une annexe? Comment ça une annexe? ». « Ben une annexe, et qui vue de la surface semblait en bon état et peut être en alu…mais pas une langouste à bord, aucun intérêt ».

Si ce n’est peut être un détail : Dom et Geneviève se sont fait « emprunter » une annexe à Grenade il y a presque un an…Ca semblerait incroyable mais dans le doute et, craignant que les 10 ans à venir ne soit marqués par une remarque quotidienne du capitaine « ah si tu avais parlé plus tôt de cette annexe… » je glisse discrètement :

« Peut être qu’on devrait aller voir quand même… »

Je retrouve l’épave, Hervé me rejoint : confirmation est faite : ça ne ressemble pas à l’annexe de Dom et Geneviève, C’EST l’annexe de Dom et Geneviève.

Incroyable…mais vrai !

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La fameuse annexe !
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Mission accomplie !!

S’en suit toute une manipulation avec la participation active de tout le monde à bord : elle est à 4m de fond et a été coulée volontairement…on enchaîne les canards, on l’amarre, on dégage le filet de pêche qui s’y est accroché, on approche Kanaga, on la hisse et hop, la voici sur le pont ! Bon les « emprunteurs » ont gardé le moteur mais pour le reste elle est plutôt en bon état ! Ravis, nous appelons Geneviève qui n’en revient pas et est toute heureuse à l’idée de retrouver sa monture !

Si seulement l’annexe pouvait parler et raconter les mois écoulés !

Croyez moi, cette pêche là que j’appelerai « le trésor de Geneviève » valait bien une langouste… !

À suivre…

Beau comme un Kanaga neuf !

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Rhôoo le beau batôooo


Kanaga
est à Carriacou depuis un mois. Une pause bien méritée après son grand tour de l’Atlantique et l’occasion de le mettre au sec pour le bichonner. On n’est pas mécontents du résultat, le voilà paré à voguer vers…le Panama !

Ah…Tyrell Bay ! C’est toujours avec la même émotion que nous jetons l’ancre ici. Dans ce bout d’île de l’Etat de Grenade, on croise les amis et des navigateurs du monde entier. Il fait bon s’y arrêter quelques semaines. C’est un de ces endroits qui semble à la fois loin de tout et en même temps être une véritable plate-forme d’échanges et de transmission d’infos et d’actualités des gens de mer. La communauté flottante prend ici tout son sens.

On se retrouve alors réunis dans le cockpit avec des vieux loups de mers qui ont fait plusieurs fois le tour du monde et des (très) jeunes qui découvrent la vie en bateau et mènent leur barque avec toute la curiosité, le brio et l’énergie que l’on a lors de ces voyages qui changent la vie.

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Connectés au monde entier…

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Une île déserte…

Après avoir vérifié que l’île était toujours aussi belle à travers quelques escapades, soutenus les différents musiciens qui animent la baie le week-end, et être allé saluer nos îles désertes préférées, il a fallu s’occuper de Kanaga. À la lecture de la « to do list », toujours la même mais un peu plus longue cette fois-ci puisqu’il s’agit de passer côté Pacifique, il faut poser le cerveau dans un coin et ne pas trop réfléchir pour ne pas partir en courant :

Conception et fabrication d’un nouvel abri de cockpit solide, anti-vagues, protégeant du froid, du chaud et des attaques de kraken : ambiance loundge (sans la boule à facette, faut pas pousser quand même).

Réparations et maintenance des voiles : coupe slim super tendance mais sans les déchirures pour ne pas se faire remarquer.

Ponçage et vernissage de toutes les boiseries intérieures parce que pour être bien dans sa quille il faut sentir aussi beau en-dedans,

Révision et installation de vaches à eau (rien à voir avec les vaches à lait) afin d’assurer le stock de 1400 L d’eau douce avant de filer dans des contrées où l’eau sera parfois rare.

1001 « détails » de mécanique et plomberie auxquels la scribe se sent quelque peu étrangère -chacun sa spécialité !

Et puis la sortie de l’eau. Ce fameux rendez-vous annuel durant lequel on tremble lorsqu’on envoi notre bateau en l’air de peur qu’il ne tombe, non pas amoureux mais…bien bas !

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Ouh là là…
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Ça ponce…
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Vernis intérieurs…
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Inspection finale !

Une fois la bête calée – 36 tonnes quand même- sur ses pattes d’acier, on peut s’attaquer au gros du boulot : nettoyage, antifouling et peinture de coque.

Et cette année, plusieurs vaillant(e)s s’y sont attelé…Un grand grand merci à ces aides salvatrices et bienvenues pour gratter, poncer, peinturlurer la coque de notre monture. Et vu son embonpoint, autant vous dire qu’il y a de la surface !

Avec ce déploiement d’énergies, en quatre jours Kanaga s’est refait une beauté ! Il a même retrouvé ses Kanaga d’étrave, petits bonhommes rouges dans un cercle bleu. La remise à l’eau fait à peu près autant trembler que la sortie…mais l’amerrissage s’est fait là aussi tout en douceur. Ouf !

Et puis il était temps d’honorer une vieille tradition maritime…voilà deux ans bientôt que nous avons Kanaga et que nous l’avons ainsi baptisé…sans couper trois fois le sillage du bateau. Grave erreur. Ce rituel est conseillé lors du changement de nom d’un canot et vous savez combien les marins sont superstitieux. Alors à ceux qui nous on vu faire des ronds dans l’eau dans le fond de la baie en sortant du chantier, oui c’est parce que Kanaga était content, mais surtout on en a profité pour remédier à ce manquement !

  • Bon et maintenant on fait quoi ?
  • Ben on va vers le Pacifique !

Départ dans une quinzaine de jours pour descendre à Grenade…première étape des nouvelles pérégrinations de Kanaga !

À suivre !

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Tyrell Bay au couchant…