Bienvenue au Guna Yala ! Premières impressions…
Journal de bord
Kanaga sillonne l’archipel des San Blas, en Pays Guna, depuis 3 semaines désormais. Petit à petit nous découvrons comment vit et s’organise cette communauté d’indiens, au carrefour de leurs traditions et de la mondialisation.
Par où commencer…Kanaga s’est d’abord faufilé doucement et les yeux grands ouverts entre les récifs coralliens et les nombreux îlots qui parsèment le pays Guna. Arrivant de Colombie, la première étape se devait d’être administrative : formalités d’entrées au Panama et sur le territoire Guna sur l’île d’El Porvenir. Mais cela ne suffisant pas, à peine arrivés il nous a fallu déjà partir pour Puerto Lindo, à 40 milles à l’Ouest pour les taxes douanières. Nous avions hâte de nous défaire de ces obligations pour être libres de découvrir le Guna Yala.
Enfin.
Vient alors le moment de consulter le guide de navigation, le « Bauhaus » comme l’appellent les voiliers ici, la bible pour dégoter les mouillages sûrs et choisir parmi les centaines d’îles celles où nous faisons escale. Waisaladup, Kanlidup, Narrasgandupdummat, Sabudupored etc, sont quelques noms d’îles locales…autant vous dire qu’au départ, on baigne dans des sonorités inhabituelles et on peine parfois à se repérer côté nomenclature !
Nous avons choisi de nous confronter d’abord aux îles « du large ». Entendez par là, les îles désertes paradisiaques. La rumeur dit que les îles des San Blas sont celles qui ressemblent le plus aux îles du Pacifique. Nous irons vérifier, mais effectivement, lorsque gamin l’on dessine une île de rêve elle ressemble fortement à celles que l’on trouve ici : prenez un tout petit îlot, avec des plages de sable blanc, plantez-y quelques cocotiers et autres palmiers (évitez de faire la sieste sous les cocotiers, c’est très dangereux…). Faites quelques pas, et suivant les îles vous trouverez…rien ou quelques « nega », cases locales faites de tiges de bambou et cannes à sucre, et épais toits de feuilles de palmes.
Seule ombre au tableau, les déchets plastiques qui s’amoncellent au vent des îles, avec des sargasses. Ceci pour deux raisons principales : nous sommes ici au fond de la mer des Caraïbes et vents et courants drainent de nombreux déchets. De plus, localement, l’arrivée des plastiques dans les années 70 chez les Gunas, sans aucune possibilité de traitement des déchets est un véritable fléau, nécessitant des moyens financiers et infrastructures techniques. Les canettes sont récupérées et revendues, et dans les îles-villages les déchets sont utilisés mélangés à des gravas pour gagner du terrain sur la mer et construire de nouvelles cases, et ici et là, ils sont brûlés.
Pourtant, sous l’eau, chaussez un masque et vous serez saisis par le spectacle : les coraux semblent en très bonne santé, les eaux sont très poissonneuses et les langoustes galopent sur les récifs ! Requins, raies en tout genre sont aussi présents, et paraît-il que l’on peut croiser quelques crocodiles mais pour l’instant nous avons été épargné (ce qui n’est pas pour déplaire à votre dévouée scribe qui s’en trouverait fort marrie…).
De retour à bord, vous observez le ballet de quelques « ulu », les pirogues locales, creusées dans un tronc d’arbre (gommier, manguier), qui viennent sur les îles du large pour récolter les cocos. Chez les Gunas, il n’y a pas de propriétaires terriens, l’île appartient à une communauté qui est soumise à l’autorité d’un Sahila. Ce chef de village, établi avec les villageois au cours des « congresso », réunions quotidiennes ou bi-hebdomadaires suivant les îles, des règles de vie plus ou moins traditionnelles. Pour les cocos, les différentes familles se relaient sur des périodes de deux ou trois semaines pour la récolte, laquelle revient alors à la famille du moment. Elles sont ensuite vendues principalement aux Colombiens qui les utilisent, entre autre, pour des applications cosmétiques (0.5 dollars la coco). Les « ulu » sont aussi utilisés pour la pêche bien sûre, artisanale ici, ce qui explique surement la qualité des fonds marins. Les Gunas sont d’excellents apnéistes et certains plongent quotidiennement à 10 ou 20 m de fond pour pêcher au fusil quelques langoustes et poissons. Le produit de la pêche est alors pour la famille et aussi vendu aux plaisanciers qui traînent leur quille par là.
Puis vient le moment où il nous faut nous ravitailler en fruits et légumes frais…un bon prétexte pour une immersion au coeur des villages…comme précisé précédemment, des règles sont établies et divergent suivant les Sahila plus ou moins traditionnels. Les îlots habités sont petits…et proportionnellement surpeuplés (500 habitants pour une île qui doit faire 1 km carré..). Sur les îles les plus modernes, les toits en palmes sont remplacés par des toits en tôles, et les parements en canne ou en bambou remplacés par du parpaing. Tout le monde semble parler un bon espagnol et le groupe électrogène ronronne (fort) toute la journée pour alimenter entre autre les téléviseurs. C’est le cas de Nargana, une des iles les plus éloignées de la tradition dont certains Gunas voient d’un mauvais oeil l’abandon des coutumes. Pour autant, on est encore très loin de l’agitation de Panama City…nombreux sont d’ailleurs les Gunas qui vont y travailler, et ramènent alors les nouvelles de « là bas ».
A suivre…
1 Comment
Agréable de visiter toutes ces îles inconnues avec un scribe qui les décrit si bien et de façon si vivante ….
Merci pour le partage de vos découvertes et émotions…..