Un café baleine pour le Kanaga s’il vous plaît !
Journal de bord
Voilà presque 5 mois que Kanaga est au Panama. La faune ne cesse de nous étonner ici. Après une courte escapade terrestre dans la jungle, c’est de nouveau sur et sous l’eau que nous sommes confrontés à Dame Nature. Kanaga étant reconnecté aux ondes WIFI, voici le retours sur ces quelques rencontres… d’exception.
A bord du Kanaga, au milieu de la nuit. Un gémissement insistant. J’ouvre un oeil, je me lève et me dirige vers la bannette de la moussaillonne, mi-endormie, mi-ronchonnant : « Oh non, elle s’est encore réveillée… ». J’arrive devant l’objet de mon courrou : pauvre petite chérubine innocente, pour une fois (!), elle dort à poings fermés. J’ouvre le deuxième oeil et les deux oreilles. Mais alors, qu’est-ce que..?
Bon sang mais oui, c’est ça ! On assiste à un concert de chants de baleines à bosses à travers la coque du Kanaga. Il y a des chants, des phrases, graves, aïgus, des cliquetis, des qui se répètent plusieurs fois, d’autres qui se répondent d’un bout à l’autre de la quille.Pourtant dehors, personne. Mais la légende dit que ces chants sont capables de parcourir des milliers de kilomètres. Je passe le reste de la nuit à les écouter, oubliant de dormir.
Nous sommes à Contadora, au Nord de l’Archipel des Perlas, où Kanaga est revenu chercher du calme après l’agitation de Panama City. Les cétacés sont au rendez-vous, les baleines à bosses viennent mettre bas ici chaque année et préparer les « petits » aux navigations hauturières… On peut les y observer de juillet à octobre.
Quelques jours plus tard, nous mouillons plus au Sud, au milieu d’îles désertes : alors que l’on prend un petit café, trois baleines croisent à moins de 20mètres de la coque : deux femelles et un baleineau…nous les recroiserons l’après-midi alors que nous sommes sous voiles, et assistons à ce qui ressemble à un cours de sauts pour le petit…Mais le spectacle n’est pas fini. Deux jours plus tard, c’est la presque pleine lune. Nous assistons à notre concert désormais « habituel ». Une échappée sur le pont suffit pour voir dehors l’une de nos géantes préférées s’adonner à des acrobaties, on aura même droit au saut dans le clair de lune…pourtant c’est promis, Luc Besson n’est pas à bord.
Toujours plus au Sud, nous testons un autre mouillage, cette fois-ci à un mille d’un petit village de 50 habitants, las Cañas. Au petit matin, un souffle. On monte sur le pont : une baleine et son baleineau sont de nouveau à une cinquantaine de mètres de Kanaga. Elles ne bougent pas, elles se reposent.
Mon voisin me dit : « t’es pas déjà à l’eau toi qui en rêve ? »… Oui, j’en rêve, mais quand même là, elle est balaise la baleine…ceci étant il est vrai que des occasions comme celle-là, il ne s’en présentera peut-être jamais plus…
Je chausse les palmes et le masque et file vers les mastodontes. Il doit y avoir dans ce mouillage à peine 3m de visibilité, l’eau est pleine de plancton. Je nage et j’essaye d’évacuer l’appréhension et le trac….Je m’approche, sous l’eau je ne vois rien, je relève la tête, je suis à moins de 10m. Je m’approche, 5m. Elles ne bougent pas. Je ne vois toujours rien sous l’eau. Je respire…Je m’approche en veillant à rester sur le flanc de l’animal. 3m.
Et je la vois. Je les vois.
La femelle, la mère, statique avec ses immenses pectorales blanches juste à quelques cm de moi avec le bas de son corps qui plonge et dont je ne vois pas le bout dans cette eau turbide. Je devine son oeil. Son rostre, immense, avec des lèvres blanches et les balanes accrochées au museau. Collé au rostre, le baleineau qui a droit apparemment à une séance de câlins.
Je n’ose plus bouger, je ne veux pas déranger…et je ne suis pas chez moi.
Les baleines restent là, silencieuses et sans bouger. Combien de temps ça a durer ? Aucune idée,, cinq, dix, vingt minutes, plus ? Apparemment plus, mais le temps s’est figé.
Puis tout doucement, imperceptiblement, la mère bouge la pectorale, pivote. La puissance de son souffle me fait sursauter. Je m’éloigne sur la pointe des palmes et nage vers le bateau.
J’embarque, et je prends un café.
J’ai rêvé là non ?
À suivre…!
7 Comments
joli texte pour nous partager cette nature préservée dont vous profitez.
bises,
Anne
Superbe, magique… tant de mots qui paraissent dérisoires face à la beauté du récit !
(de Dilat Larath, équipier banette avant)
Popom, popom, popom… le cœur qui bat…
Que de frissons, de moments suspendus et de joie intense dans ce récit !!!
Well done John, encore un rêve à cocher sur la liste héhé ! Ca c’est fait. C’est beau.
Bisous à vous les Kanagalais !
Waouhhhhhh
Ça doit être, comment dire, waouhhhh!!!!
Tu as su provoquer ton rêve, chapeau bas pour le courage 😉
Whaou ! Tu m’étonnes Que tu crois avoir rêvé ! Ça devait être magique ! Merci pour ce beau récit. Bises à tous, Manette
bonjour au bord ,
je me promenais le long de la côte et me disais , pas de news de kanaga depuis lgtps et boum en rentrant ton message était là , merci Laetitia
superbes moments , superbe texte qui les fait tellement passer les émotions les joies l’appréhension
je suis super heureux , pour toi la sirène, que tu ais pu vivre de tels instants
la biz à vous trois
bernard …..l’équipier babord avant
Belles rencontres et racontées de façon magique ….continuez à nous émerveiller !