Catégorie : Journal de bord

Un bateau dans le ciel…

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Le vol du Kanaga

Car oui les bateaux qui vont sur l’eau ont des ailes, c’est désormais une certitude. Ceci étant, avant de se prendre pour Icare, Kanaga a eu droit à un véritable parcours initiatique le long des côtes normandes…

Au départ, il était prévu qu’il prenne son envol à Honfleur pour nous montrer ses dessous (oui, parfaitement, ses dessous). Mais un problème technique sur l’élévateur nous a mené à Deauville.

Le lundi, c’était férié, pas d’envol,

Le mardi, il y avait un vent à décorner les vaches normandes…donc pas d’envol,

Le mercredi des travaux dans le bassin à flot ont contraint l’équipe du port à baisser le niveau d’eau de 40 cm…Kanaga, avec ses 2,4m de tirant d’eau ne pouvait plus se présenter devant l’élévateur (et oui, sans cette machine, pas d’ailes), donc, pas d’envol.
Le jeudi, le niveau de l’eau était rétabli, mais une fois présenté sous l’élévateur…les mâts étaient trop éloignés l’un de l’autre et l’élévateur a trouvé Kanaga trop gros à son goût ! C’est limite vexant….Bref, vous l’aurez compris…pas d’envol.

Le vendredi, il fallait trouver une solution et sortir Kanaga de ces lieux. Casino et voitures de sport font tourner l’étrave, même aux meilleurs d’entre-nous. Il serait dommage de se faire plumer au moment où l’on se sent pousser des ailes…

Nous avons donc étudié toutes les possibilités de décollage sur la côte normande…pour jeter notre dévolu sur Cherbourg où il y a un élévateur de 300 tonnes qui lui aime les gros bateaux.

Ni une ni deux, nous avons fait route vers ce bout du monde. Une lune rousse et énorme se lève alors que nous passons le raz de Barfleur. Un clin d’oeil pour les Intechmériens à hauteur de Tourlaville…

Arrivés au port de Chantereyne, nous attendons sagement, entre Napoléon et le sous-marin le Redoutable -même pô peur. Jusqu’à ce matin où nous nous sommes rendus au pied de la machine géante. Kanaga s’est positionné en son centre, le machiniste avec son joystick a placé avec beaucoup d’application les sangles de part et d’autre du canot. Il n’a plus eu qu’à s’envoler !

Centimètre par centimètre Kanaga a été levé, sorti de l’eau : pour la première fois nous l’avons vu en entier. Impressionnant !

Hou là là…

Le verdict tombe, l’élévateur faisant aussi pèse-bateau : Kanaga pèse 35 tonnes ! Sa quille longue est peu à peu dévoilée et il a certes, plus un air de cachalot que d’oiseau avec sa bedaine. Mr Joystick est toujours aux commandes et il conduit Kanaga tranquillement et sûrement jusqu’aux bers : ces pattes d’acier vont lui permettre de garder l’équilibre le temps du carénage.

Karsher, ponçage, peinturlure et nom à apposer sur la coque…C’est parti pour une petite semaine de boulot.

La naissance d’un film…

Pendant ce temps, deux drôles de zigues ont suivi Kanaga avec des caméras, trépieds et tout un attirail de reporters. Ces deux là sont plongeurs et documentaristes animaliers. Ils projettent de venir naviguer à bord de Kanaga pendant deux ou trois mois avec d’autres acolytes pour filmer des bêtes à écailles et des mammifères marins. Non, pas ceux qui vivent à bord, mais plutôt ceux qui vivent sous l’eau et qui passent leur temps à voir les dessous de Kanaga (ah les veinards…!)

En attendant, Kanaga est un bateau dans le ciel, et son équipage est paré à décrocher la lune !

A suivre…

La première sortie de Kanaga…attention, on tourne !

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Un dernier adieu…

Il fait grand beau en ce dimanche et nous sommes douze à bord, trépignants d’impatience pour cette avant-première sortie en mer avec le Kanaga.

Nous démarrons la machine, que nous baptiserons à partir de maintenant Vince – comme Vince Diesel…parce qu’il est américain, grand, costaud et qu’il marche au gasoil ! Un grand cygne blanc nous survole à ce moment là, un figurant bienvenu.

Les autres voiliers du quai Nord du port de Honfleur ont mis leurs grands pavois, et nous réalisons une ronde commune dans le bassin en attendant l’ouverture du premier pont…Nous passons les uns après les autres, et nous entendons clamer « vive Kanaga! » et répondons à de chaleureux grands adieux…

Même mise en scène avant de passer un deuxième pont qui ouvre sur le dernier bassin avant la mer…Nous rejoignons les bateaux de pêche qui sont eux aussi costumés, l’un d’eux est même couvert de fleurs. La foule est nombreuse, massée sur les rues pavées le long des quais. Nous n’en revenons pas, tout ce monde!!! Il faut dire que la nouvelle a été diffusée à travers toute la Normandie…

Nous échangeons quelques mots d’un bastingage à l’autre avec un fier vaisseau militaire qui s’est déplacé pour l’occasion. On ne joue pas la carte de la grande production en lésinant sur les moyens. A notre bord nous avons du beau monde : des représentants locaux, une délégation parisienne, une bretonne et même une délégation de l’île de Chiloé.

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La parade…
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Les bateaux de pêche arborent le grand Pavois…

Les différents bateaux paradent, jusqu’à l’annonce de l’ouverture du sas qui ouvrira sa porte vers la mer…CLAP ! …la clé de la liberté pour Kanaga.

A ce moment précis on nous appelle à la VHF : une surprise nous attend justement au niveau du sas à tribord. Et là le cascadeur de notre film crève l’écran : juché sur l’échelle, suspendu plusieurs mètres au-dessus du vide, risquant la chute, le patron de l’Amoretto, dont on vous recommande les pizza, nous tend une bouteille en souhaitant « longue vie à Kanaga ! » ! Un beau coup de projecteur.

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Cherchez le cascadeur…à droite de l’image !

Nous faisons un dernier adieu à la foule avec le sentiment d’être à l’aube d’une nouvelle histoire où tout est possible. En coulisse on nous précise que l’évènement en question était évidemment, la sortie de Kanaga, mais…aussi, heu, la fête des marins de Honfleur, ce qui nous a amené un public nombreux. Ah…c’était donc ça !?

Toujours est-il qu’à bord l’émotion n’en est pas moins forte !

Deux petites heures de navigation dans la lumière du soir nous permet de nous rendre à Deauville, oui oui, Deauville, pour faire plaisir à Vince. Nous y carènerons le bateau cette semaine : on a du pain sur les planches !
Gageons que ces premiers milles sous des airs de grande production hollywoodienne soient un beau présage, c’était la première séance.

A suivre…

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Enture pour l’avenroute…

Quand Kanaga tombe le masque…

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Kanaga se prépare…

Après 10 heures de route, enfin les panneaux Honfleur. Kanaga est là quelque part, attendant sa nouvelle famille d’adoption… Au détour d’un dernier rond-point, j’entraperçois son étrave. C’est lui !!! Plusieurs semaines, voire mois, que j’attends ce moment. LA rencontre avec notre futur canot.

A bord, une partie de l’équipage s’active déjà depuis 4 jours pour lui redonner « vie ». Merci aux Jeans. Cela fait deux ans que Kanaga attend sagement au quai Nord que du monde se décide à reprendre la route avec lui.

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Il y a tout d’abord ce moment de découverte, où celui que l’on a imaginé devient réalité. Un ketch avec une belle ligne, grand, ventru, le cul pointu et légèrement relevé des Colin Archer : la charpente d’un beau Norvégien.

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La charpente d’un beau Norvégien !

Dès les premiers pas à bord, je suis conquise : le plan de pont est large et dégagé, les winchs sont balaises et les deux mâts laissent présager des dizaines de mètres carrés de toile qui lui donneront toute sa puissance en mer. La barre à roue est reliée à un imposant safran et l’on se voit déjà naviguant au large, debout sur le bout dehors, lancés tout dessus, les dauphins, baleines, sirènes par centaines nous escortant, avec Poséidon à leur tête…Bref, la vie quoi ! Les marins se régalent par avance des manoeuvres à venir, les aficionados de la pêche à la traîne rêvent déjà de leur futures prises. Les poètes, repèrent les coins qui se prêteront à la contemplation…quant aux bricoleurs, ils rêvent de passer à la suite !

C’est indéniable, Kanaga est fait pour naviguer loin là bas, dans le froid ou sous les tropiques : c’est sûr, tout sera permis !

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La couturière à l’ouvrage dans le carré, sous le regard d’un des marins de Nibor.

Venons-en à l’intérieur. La construction de Kanaga a commencé en 1981, pour une mise à l’eau en 1983. C’est Jean-Pierre Ouvrard, artisan de métier, qui l’a construit de ses mains. La descente mène au carré dans lequel on remarque de suite à quel point ce gars avait le souci du boulot bien fait. Tout l’aménagement est en bois rouge, avec de nombreux détails, des cuivres aux finitions des équipées soignées. Le poêle devra patienter jusqu’à notre future navigation terre-neuvienne pour ronronner. La table à carte guette son prochain plan de route et l’atmosphère chaleureuse du carré donne envie de s’y caler avec une bonne BD. Y’a plus qu’à finir les nouveaux coussins, c’est en cours. Quant aux couchettes et cabines, elles n’ont pas à rougir. Seule inquiétude, arriverons-nous à nous en extirper à 4h du mat’ pour prendre le quart ? Pas si sûr…

Pour les détails, je vais m’arrêter là, vous viendrez voir par vous même !

Nous sortirons Kanaga de l’eau pour le carénage à Deauville du 6 au 10 juin…Il nous restera ensuite 15 jours pour fignoler et faire les essais en mer avant sa première navigation de la Normandie à Guernesey.

Appareillage prévu le 24 juin !

A suivre…

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